Traduite en français par : « Aussi longtemps que je peux retenir mon souffle », cette phrase suggère un « souffle » dans l’espace pris dans une tension entre gravité et légèreté. Léger et aérien par sa nature physiologique, il est également grave par son besoin immédiat et vital. Il devient l’ouverture possible qui régit l’ensemble des organismes. Conditionnant l’ensemble des échanges migratoires, ce phénomène est ainsi omni-présent. Il permet de maintenir l’équilibre d’un éco-système sans cesse en mouvement. Ces déplacements qu’ils soient physiques, matériels, culturels, imaginaires, psychologiques provoquent dans cette mutation des lieux : des crispations. Le souffle, porteur de la vie est menacé dans cette densité qui désormais semble s’éprendre d’un vaste étouffement de toute part. L’environnement devient hostile et ne permet plus d’apporter cet oxygène.
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Dans son œuvre composée de deux vidéos, Mohamed Thara met en scène dans la première, le naufrage d’un bateau de migrants au sud de l’île italienne de Lampedusa avec une recontextualisation audiovisuelle d’archives du naufrage. Hanté par la tragédie de Lampedusa du 3 octobre 2013, au large de la Libye, aux frontières de l’Europe, ce montage visuel retrace l’horreur cauchemardesque des 400 cadavres qui sont remontés à la surface. La deuxième vidéo montre quant à elle des hirondelles qui quittent l’Europe en automne pour hiverner en Afrique. En mettant ces deux vidéos dans un même espace, l’artiste conjugue les différentes représentations de cette crise migratoire. En jouant avec force sur les différents symboles qui traversent la figure du migrant et de l’hirondelle, Mohamed Thara fait de la métaphore un lien et rappelle que l’espace est avant tout une nature qui ne peut être réduit à une fixité, voire à une rigidité. Elle se vit dans le mouvement et dans une recherche incessante d’un équilibre entre intérieur et extérieur, comme l’air entrant et sortant des poumons, entre le tout et ses parties.
« Au bout de ce souffle », il se pose une même question : celle du vivant et de sa survie. Lutter à contre-courant des phénomènes migratoires, c’est mettre en œuvre le péril du vivant, de ces réfugiés et de ces hirondelles. « Aussi longtemps que je peux retenir mon souffle » est une œuvre qui appelle à préserver l’espace comme terre d’accueil et à entretenir le flux de la solidarité afin de faire de ces liens, des lieux.